« On ne cherchait pas à combler un vide, on était juste égaré en ce monde avec un chagrin intangible. L’audace nous a rendu à nous-mêmes. On avait 20 ans pour l’éternité et on l’avait oublié. On est venu parce qu’on avait du chagrin. On est devenu opposant, militant, résistant, activiste. Le chagrin réveille encore des nuits impaisibles, mais il rassemble en des banquets éphémères où la joie l’emporte souvent sur le découragement. Peut-être avait-on un chagrin parce qu’on voyait s’éteindre en nous toute confiance en une communauté humaine… On était cet homme-là et on ne le montrait pas. On était cette femme-là et on ne le savait pas. Alors oui, peut-être n’est-il pas vain ce chagrin qui fait de notre peur un lendemain des possibles ? Nous étions debout et nous ne le savions pas. »