Contrairement à ce que l’affiche laisse penser (un juge flou qui pointe le doigt en direction d’une prévenue au regard terrifié, les mains sur le visage et les menottes au poignet) le documentaire "Stups" est loin d’être théâtral. Entre interrogatoires et audiences, la caméra, discrète, pose un regard objectif sur chacun des inculpés mis en examen pour une affaire de stupéfiants. Sans voix-off ni procédé narratif, Alice Odiot et Jean-Robert Viallet laissent les images parler d’elles-mêmes.

Ils seront une dizaine à avoir accepté d’être filmés à visage découvert lors de leur audience. Beaucoup sont très jeunes, voire mineurs. Leurs délits sont différents mais le constat est le même. Ils sont tous les esclaves d’un système qui se sert de l’extrême pauvreté pour faire du profit, comme l’explique, calcul de revenu horaire à l’appui, une juge pour enfant à un jeune délinquant récidiviste.

Le montage est précis et les scènes s’enchaînent sans temps morts pour consacrer à chacun le temps nécessaire pour comprendre au mieux la situation malgré la rapidité des comparutions (30 minutes en moyenne). Certaines audiences arrachent le cœur, comme celle de cette femme inculpée d’être « une nourrice ». Droite et digne, le regard sombre, elle nie l’accusation mais explique comment on la bat à coups de crosse si elle refuse de coopérer. D’autres procès, par contre, font froid dans le dos, comme cet homme âgé qui implique ses enfants et petits-enfants dans de graves délits.

Après leur précédent film "Des hommes" qui témoignait du quotidien des détenus incarcérés à la prison des Baumettes, les deux documentaristes ajoutent avec "Stups" une autre pièce au puzzle pour rapporter à échelle humaine, les causes et conséquences de la hausse du narcotrafic dans les quartiers les plus défavorisés.