« Légèreté » n’est pas un terme qu’on associerait habituellement à la
pratique artistique de Sam Durant. Cela fait longtemps que le travail de
l’artiste multimédia américain questionne, souligne et reformule des
questions d’ordre sociétal et civique liées à certains des aspects les plus
complexes de l’Histoire : le colonialisme, la peine de mort, la surveillance et
l’esclavage, entre autres.
Pourtant, dans cette exposition personnelle, une certaine légèreté, un
sens du jeu, se glissent avec douceur dans des sujets autrement graves et
pesants. Une nouvelle série de douze œuvres réexamine, et réinterprète
en partie, des images collectées par l’artiste au cours de ses faramineuses
recherches sur les manifestations et révolutions au fil de l’Histoire. Dans
les périodes de fracture et de bouleversement politique, il est fréquent que
les manifestant·e·s renversent les symboles et monuments rattachés aux
structures de pouvoir en place afin de les remplacer par les leurs (la récente
série de Sam Durant titrée Iconoclasm donne à voir des images de ce genre
de manifestations via des dessins au graphite ; certains travaux précédents
de l’artiste montrent de nouvelles façons d’ériger des monuments et « de
faire monument », pour ainsi dire).
Lors du processus de fabrication de ces œuvres, Durant a analysé ce
matériau source et, au lieu de dessiner des manifestations, il a démonté,
découpé, puis réarrangé des fragments de ces images – majoritairement en
noir et blanc – de monuments renversés. Si le terme anglais « Iconoclasm »
renvoie au morcellement des images, ici c’est comme si l’artiste morcelait
non seulement les images mais les déchirait aussi pour ne plus en tenir
entre les mains que de tout petits fragments, comme l’on pourrait limiter
un mot à ses simples lettres. En cela, il semble se demander si le fait de
réduire les symboles et les représentations du pouvoir à leurs composantes
élémentaires peut résulter en une sorte de poésie visuelle minimale.