Doué d’un esprit facétieux, Richard Woods déjoue l’ambivalence d’une terminologie trop précise dans ses œuvres, lesquelles relèvent tour à tour de l’installation, du décor ou du design, mais toujours empreintes d’une esthétique pop.
Partir à la recherche de la biographie de Richard Woods, artiste britannique né en 1966 à Chester (Cheshire), peut s’avérer, au départ, quelque peu confus, et conduire sur certaines pistes d’homonymes… Celui qui nous intéresse est diplômé de la Slade School of Fine Art, en 1990 – soit au tout début de l’émergence des Young British Artists. Que le patronyme puisse déterminer un parcours se pose avec Mister Woods (« Monsieur Dubois ») qui se dit obsédé par ce médium (le bois, donc), remémorant même un souvenir d’enfance fondateur : « Il y avait une petite zone boisée juste derrière la maison de mes parents, composée d’une quinzaine ou vingtaine d’arbres et qui disparut un jour. Le fermier avait tout abattu, coupant les arbres de sorte que les tronçons laissent apparaître leurs anneaux de croissance. J’ai alors essayé de trouver celui qui pouvait correspondre à mon âge, puis à celui de mon père, qui me semblait un vétéran à l’époque… Cet événement m’est revenu en mémoire ces derniers temps et je pense que ma nouvelle série de souches complète mon histoire d’amour avec les arbres et ma réflexion sur le temps. »
Pour sa première exposition solo chez Semiose, Richard Woods a recréé un faux décorum reproduisant une nature idéale, composé de sculptures qui, tels les rondins d’arbres en forêt, permettent de s’assoir et de penser… Dans cette installation globale peut se dégager l’idée d’un hors-temps, d’une sorte d’abri et de protection, ajoutée à la tautologie du propos. Ainsi, Richard Woods aime que le motif veiné du bois, employé pour ses planches et ses souches, soit de… bois. Il dit favoriser une conversation entre les matériaux usinés qui recouvrent ici les murs de la galerie et les rondins coupés qui reposent au sol, faisant la simple démonstration du « cause à effet ». À cette conceptualisation, s’ajoute un hommage à l’Arts & Crafts, mouvement né peu après la Révolution industrielle en Angleterre, et qui témoignait tout autant d’un sentiment d’angoisse face au progrès et d’une aspiration au retour à la poésie, que du projet de rendre la beauté accessible au plus grand nombre. L’artiste cite ainsi plus volontiers William Morris – lui-même adorateur de la forêt – que n’importe lequel de ses contemporains. Il lui importe aussi de pouvoir réaliser l’ensemble de ses pièces à l’atelier. Ce rapport au faire est accentué par son parcours personnel et ses différentes expériences en termes de médiums et d’échelles avec son propre corps – il a travaillé sur des chantiers de construction durant ses études et au début de sa carrière. « J’étais peut-être un peu isolé dans ma réflexion quand j’ai commencé, poursuit-il, mais aujourd’hui, s’observe largement un retour au travail manuel, tandis que le digital se développe, en parallèle, de plus en plus. Nous sommes dans un complet mariage high & low des pratiques et des technologies, ajouté à ce côté décomplexé de pouvoir présenter des œuvres, qui, pour certaines, s’avèrent utilitaires… ».