Reçu fraîchement, voire totalement ignoré par le public, Révélations est un film aujourd'hui méconnu, parfois méprisé, malgré sa terrifiante grandeur.
Médaillé chevalier du bon goût des années 80 avec la série Deux flics à Miami, maître du thriller grâce à Heat et Collatéral, expérimentateur révolutionnaire avec un Miami Vice qui révolutionna l'approche du numérique, Michael Mann a plus d'une distinction à sa veste. Même ses pépites oubliées demeurent célèbres, comme en témoigne le culte entourant le pourtant très peu vu La Forteresse noire. Néanmois, il est un de ses films qui demeure singulièrement peu commenté.
Il s'agit de Révélations, qui compte pour ses aficionados comme un des sommets de sa carrière, peut-être sa création la plus impeccablement maîtrisée, puissante formellement, et intelligente. Étonnamment peu commentée, elle fonctionne aussi, grâce au talent de ses interprètes et à l'énergie inattendue qu'y infuse son réalisateur, comme un récit de pure terreur.
Une affiche qui donne la super pêche
Mais pourquoi le film a-t-il laissé si peu de traces ? Son metteur en scène vient tout juste d'enchaîner Le dernier des Mohicans et Heat, un grand succès populaire et une date dans le cinéma de gangster, un classique instantané. Non seulement il peut à peu près tout se permettre, mais la presse n'en demande pas moins et s'impatiente de pouvoir tresser les louanges du nouveau génie d'Hollywood, qui plus est à l'occasion de retrouvailles avec Al Pacino, dont l'aura de star brille encore au firmament.
Tout d'abord, et on y reviendra ci-après, le film déjoue beaucoup des attentes. On y suit ce qu'on n’appelle pas encore un lanceur d'alerte, qui va tenter par tous les moyens de faire éclater au grand jour les plus terribles secrets dissimulés par l'industrie du tabac. Chemin faisant, il découvrira les extrémités auxquelles ces entreprises sont prêtes à succomber, le pouvoir délirant accordé aux lobbies, mais aussi la véritable nature du secteur télévisuel.
Une suite de faux semblants, de menaces et de chausse-trappes, qui constituent une toile gluante, habitée par des arachnides aussi impavides qu'affamés. On y retrouve englués les motifs chers à l'auteur, ses idées et sa grammaire, mais on verra comme ceux-ci aboutissent à une logique et un cheminement émotionnel bien différents de ce à quoi il nous a habitués. Cette spécificité tonale aura sans doute découragé, ou à tout le moins décontenancé une partie de ceux qui ont découvert le film lors de sa sortie.
"J'fumerai bien une clope moi"