Les lames de bois d’un parquet flottant ne sont pas fixées au sol mais simplement assemblées entre elles par rainures et languettes. Elles remplacent les planchers traditionnels en bois massif dont elles imitent l’aspect en masquant les sols d’origine, jugés démodés par les propriétaires des lieux. De mauvaises qualités, elles se désagrègent au bout de quelques années. Accotées les unes sur les autres aux murs des immeubles, elles recomposent une alternance de strates, dépôts successifs de matériaux emblématiques de notre société de consommation. Elles subiront un phénomène d’érosion sur les trottoirs des villes pour constituer des « monstres », des créatures fantastiques, tout un Monde flottant1.
Stéfan Tulépo utilise des objets d’usage courant, produits en grande série, promis à l’abandon, à la destruction ou à la désagrégation. Ils évoquent une archéologie contemporaine, un mode de vie, une esthétique. Ils sont la matière première de ses compositions. Il en exploite leurs qualités plastiques, leurs résistances, leurs rugosités, les transforme par une intervention mécanique ou artisanale, par frottage, striures ou perçage… La porte en bois, l’ovale en bois mélaminé, dentelé et la planche à pain de la série Grattage, sauvées de la destruction, glanées au hasard de voyages, deviennent les trésors d’une pêche miraculeuse. En frottant ou en gravant la surface de ces objets, il révèle, au sens photographique, le paysage dans lequel ils ont été prélevés.