L’AVIS DU « MONDE » - CHEF-D’ŒUVRE
Que n’a-t-on jamais dit, montré ou raconté sur les amours adolescentes, de sorte qu’un nouveau film sur le sujet n’apparaisse d’emblée complètement essoré ? Si le neuvième long-métrage de l’Américain Paul Thomas Anderson (There Will Be Blood, 2007 ; Phantom Thread, 2017) renouvelle pourtant le genre au-delà de toute attente, ce n’est pas tant par l’originalité de ce qu’il raconte : un garçon et une fille se plaisent, se tournent autour et finissent par s’embrasser – la routine habituelle. C’est plutôt pour avoir vu à travers l’adolescence, qui réitère toujours les mêmes motifs (passage et initiation), un enjeu plus fort : l’incarnation d’une jeunesse susceptible de transcender les époques et de régénérer le cinéma en lui-même. Et, de fait, rarement le cinéma américain récent, hanté par le spectre de son propre déclin, avait-il fait preuve d’une telle capacité d’euphorie que dans ce film allègre et virevoltant.
Cette exaltation, c’est dans le Los Angeles du début des années 1970 que Licorice Pizza va la chercher et dont il tire, au passage, son titre fétiche de « pizza à la réglisse », d’après l’enseigne d’une ancienne chaîne de disquaires du Sud californien. Plus précisément, le récit se situe dans la vallée de San Fernando, sorte de village dans la ville, où l’auteur, né en 1970, a grandi, et qu’il reconvoque dans un geste rétrospectif, non sans évoquer celui de Quentin Tarantino avec le récent Once Upon a Time… in Hollywood (2019).