LES ARISTOCRATS
La réalisatrice Yukiko Sode évoque la question de la reproduction sociale au Japon et son poids sur les existences.
Parmi ces différents parcours de vie se profile un même sujet : celui de la reproduction sociale, qui prend ici ou là des formes insidieuses – chez les riches, celle de la tradition liée au protocole marital et aux alliances de patrimoines familiaux ; chez les pauvres, celle du fameux « plafond de verre » voué à juguler les migrations de classe. Un édifice où la femme occupe, selon son degré, des fonctions charnières strictement assignées. En articulant deux perspectives féminines, le film trace les contours d’une solidarité transclasse rassemblant l’épouse et la maîtresse, toutes deux délaissées, toutes deux méconnues.
Toutefois, la beauté du film ne tient pas spécifiquement à cette trame de significations balisée, ni même au casting un peu lisse qui l’incarne. Elle réside plutôt dans sa douce et lente scansion, qui laisse aux scènes le temps de s’installer, s’imprégnant du spleen de ces existences urbaines qui se découvrent captives d’une structure. Mais aussi dans l’étoffe romanesque du récit qui s’autorise toutes sortes de bifurcations, de retours sur lui-même, de développements dans le temps. Aristocrats se révèle dans cette imprégnation patiente des vies qui sortent peu à peu de leurs orbites respectives.
Le monde (extrait)
Suivi d'un after si souhaité