Soyons honnêtes : tous, nous nous sommes encore laissés prendre une fois, la première fois que nous avons croisé sur notre chemin une sculpture hyperréaliste dans une exposition. Même un habitué des galeries et des musées dʼart contemporain a pu ressentir ce sursaut mental en apercevant de loin un touriste en chemise bariolée de ou une jeune femme entièrement nue de John DeAndrea ; lʼeffet de vérité de ces personnages, leur incongruité ont déchiré lʼatmosphère paisible du lieu dʼexposition. Ainsi, en 1972, des visiteurs de la Documenta furent-ils choqués par Arden Anderson et Nora Murphy (1972), en les regardant comme deux amants couchés et enlacés, surpris juste après, ou juste avant, lʼamour. Bien sûr, les amateurs dʼart dʼaujourdʼhui ne sont plus choqués, mais ils nʼen continuent pas moins dʼéprouver un soupçon de gêne. La chaude présence du modèle ne sʼimpose-t- elle pas à leur imagination comme une transpiration de son effigie de bronze ? Lʼartiste, dont il faut dire quʼil est autant peintre que sculpteur, a consacré des heures et des heures de travail au rendu hallucinant de précision de la carnation, de sa transparence, à lʼaffleurement de la veine la plus délicate, du grain de beauté, du bouton, de la tache les plus infimes.