Symbole ambivalent, le feu appelle le mythe de Prométhée, le titan qui l’offrit aux hommes et fit affront à Zeus. Dans la geste prométhéenne, il est la technique première qui fonde l’humanité et lui assigne aux hommes ce qui leur revient. Héritage de la ruse de Prométhée contre Zeus, pour les dieux seront brûlés
en offrande os et graisse de bœuf, non comestibles ; tandis que les humains consommeront la viande qu’ils cuiront, se distinguant ainsi des bêtes. Aux premiers, immortels, les senteurs immatérielles de l’holocauste ; aux seconds, mortels et imparfaits, la consommation de la chair périssable.
Le cycle prométhéen enseigne que l’homme est « assigné » à l’incomplétude, que des limites s’imposent à lui : parce qu’il doit faire l’expérience de l’Autre (incarnée d’abord en la première femme, Pandore), mais aussi de la maladie, la sénescence et la mort, et parce qu’il doit travailler pour subvenir à ses nécessités, fabriquer ses ustensiles et outils – notamment par l’usage du feu (verre, céramique et fer... d’où le nom d’Âge de fer pour ce premier âge de l’humanité succédant à l’idyllique Âge d’or). À mi-chemin des bêtes et des dieux, la condition humaine est donc nécessairement tragique, contrainte, limitée.