FKDL « Figures de Style »

Avec Figures de Style, Franck Duval poursuit son exploration sensible et graphique des figures féminines, tout en renouvelant son langage visuel et ses matériaux. Le titre, emprunté à la rhétorique littéraire, donne le ton : il s’agit ici de détourner, d’évoquer, de suggérer, de raconter autrement.

Littérature, pages oubliées et narration visuelle

Les livres sont, une fois encore, au cœur de l’œuvre de FKDL. Mais pas n’importe quelles pages : celles qu’on ne lit jamais. Pages blanches, pages de garde, débuts de chapitres, fins muettes, annotations perdues... Ces fragments silencieux deviennent la toile de fond de ses compositions. L’artiste les oppose délibérément aux papiers imprimés de presse ancienne — images, articles, photos — dont il s’est longtemps servi. Ici, la narration visuelle naît du contraste entre le vide et le trop-plein, entre l’oublié et le documenté.

Teintées de nuances, ces pages vierges s’emplissent de présences : de nouvelles héroïnes apparaissent, colorées, affirmées. Contrairement aux silhouettes noires et urbaines qui ont marqué son travail des années 2000, FKDL opte ici pour la couleur, comme une nouvelle écriture du corps et du caractère. Ces femmes — portraits plus figuratifs, aux regards décidés, parfois doux mais jamais passifs — semblent défier le spectateur. Autour d’elles, symboles et détails dessinent des incipits, autant de points de départ pour imaginer leurs récits.

Figures féminines, figures littéraires

Figures de Style n’est pas sans lien avec Figures, livre d’artiste publié en 2008, dans lequel Franck Duval posait les premières bases de son univers féminin. Si les silhouettes étaient alors stylisées et fantasmées, elles deviennent ici plus incarnées, ancrées dans le réel, tout en conservant leur pouvoir évocateur.

Chacune de ces femmes pourrait incarner une figure littéraire :

• Métaphore, lorsqu’une pose ou un décor devient symbole.

• Synecdoque, dans un détail vestimentaire ou un geste suggérant le tout.

• Oxymore, quand la douceur du trait cohabite avec la force du propos.

• Litote, dans la retenue élégante d’une posture.

• Allégorie, lorsque la toile devient le théâtre d’un récit plus vaste.

Une nouvelle voie explorée : l’automobile

Autre surprise dans cette exposition : l’apparition d’un nouveau sujet, inattendu chez cet artiste profondément engagé dans une représentation féminine. FKDL introduit ici l’univers automobile, en particulier celui des grandes voitures américaines, traitées avec des lignes sobres, élégantes, presque oniriques.

Retour au noir originel dans ces œuvres, mais sans nostalgie : ces véhicules incarnent une forme de liberté, de mouvement, presque de désir. Loin d’être une figure viriliste, la voiture devient une carte blanche plastique, un terrain d’expérimentation graphique et symbolique. Les fonds, plus abstraits, traduisent le flux, la vitesse, le rêve.

Avec Figures de Style, Franck Duval confirme qu’il n’en a pas fini avec la transformation, le glissement, le jeu des couches visuelles et mentales. Il continue à réinventer son vocabulaire, entre mémoire et modernité, archétypes et individualités, silence et expression.