ART-ILLERIE
Une autre histoire de l’art
Depuis longtemps, Dimitri Tsykalov appelle affectueusement son atelier « le bunker ». Il n’est donc pas étonnant que de cette casemate – à la fois abri et avant-poste – soient sorties pour cette exposition des pièces qui ont toutes à voir avec la violence et avec la guerre. Non pas que leur sujet soit le bellicisme ou la stratégie militaire. Plus subtilement, avec ses sculptures et dessins, Tsykalov exprime l’art par les moyens de ce qui rend matériellement la guerre possible, au niveau le plus élémentaire : les containers de munitions.
Il ne s’agit pas ici le moins du monde d’un « art de la guerre », mais d’une façon renversante de faire triompher l’art par les moyens et les outils de ce qui en semble apriori le plus éloigné : la guerre. À l’ombre portée de la guerre sur la culture, l’artiste oppose l’ombre portée de la culture sur la guerre. Dans un saisissant paradoxe, Tsykalov crée avec ce qui détruit. Toutes les pièces d’ELEMENTS sont en effet construites à partir d’un démembrement, d’un découpage et d’un réagencement de ces boites sans lesquelles la guerre ne pourrait tout simplement pas avoir lieu.
Avec ELEMENTS, l’art est passé par les armes. Et l’on est bien obligé désormais de se rendre compte que les mots « art » et « artillerie » ont une partie commune.