DES SOLEILS ET DES NUITS
Pour sa première exposition personnelle à la galerie, du 5 septembre au 19 octobre 2024, l'artiste marseillais Jérémie Cosimi confronte avec dextérité ancestralité et contemporanéité dans une exposition intitulée Des soleils et des nuits.
"Une lumière éclot dans l’obscurité et caresse la peau rugueuse d’un agrume, la viscose de survêtements, la surface rocailleuse d’une ruine, le plissé d’un drap ou encore les sillons caverneux d’un coquillage. Elle éclaire des objets, des corps, des situations poussées à leur acmé. Elle incendie le paysage, théâtralise les figures et les portraits comme elle souligne le silence des choses ici traduites par la peinture ou le dessin. En clair-obscur, elle fascine tout autant qu’elle irradie, installant une atmosphère incertaine, balancée entre le diurne et le nocturne, entre la chaleur moite de l’été et le réconfort d’un brasier.
Les nouvelles œuvres de Jérémie Cosimi, pensées pour sa première exposition personnelle à la galerie Les filles du calvaire, déploient une histoire en pointillé, faite d’éclats et de manques. Sans s’inscrire dans une narration déterminée et grandiloquente, elle s’ancre dans un rapport intime avec les sujets représentés. Ces derniers se font souvent l’écho de courtes nouvelles ou de longs poèmes écrits par l’artiste, qui échappent à notre lecture. Car l’intention n’est pas de donner à lire mais à voir. Ces mots irriguent en creux sa démarche et inspirent des gestes qui au fur et à mesure deviennent des scènes. La photographie en saisit la composition avant que la peinture ne transfigure l’image. Ces opérations de traduction ne cryptent néanmoins pas le référent. Au contraire, ces étapes permettent de synthétiser les choses, d’en cristalliser l’essence. La prédilection du peintre pour la miniature, sans que ce format soit exclusif, complétée d’un intérêt marqué pour la texture variable de ses supports faisant vibrer de la matière picturale, ajoute au caractère précieux qu’il confère à ses sujets.
Les corps et les objets représentés proviennent du quotidien de l’artiste, relatant implicitement une proximité vécue, sans basculer pour autant dans l’autobiographie. Transposés par le prisme de la mise en scène, puis de la peinture, ils se dévoilent hors de leur contexte d’origine. Ils émergent au sein de décors souvent constitués d’un nombre réduit d’éléments. Au-devant d’un drapé, sur un fragment de colonne, à l’amorce d’un fond sombre, sur le plateau lisse d’une table, les figures et les choses dépeintes écrivent par leur présence une phrase poétique et par endroit chorégraphique. Les intérieurs clos, l’obscurité de certains arrière-plans et la faible profondeur de champ souvent privilégiée dans les compositions, tout en préservant un degré d’intimité, mettent sous tension les sujets. Ce jeu avec les codes scéniques répond au théâtre du monde, à sa beauté et à ses drames. Il ouvre une réflexion sur les fondations de nos sociétés tel un rappel des multiples strates et brisures qui les sous-tendent. Corps et objets se déploient alors en funambules intranquilles sur une ligne tendue où le passé et le présent s’entremêlent.