La fildefériste Marie Molliens avait prévenu : sa mise en scène de sortie du CNAC (Centre National des Arts du Cirque) marquerait un retour aux codes du cirque traditionnel. Avec une clique de Pierrot lunaires coincés dans un dilemme mussolinien entre art festif et réflexion poétique, BALESTRA tient de toute évidence ses promesses.
Texte : Agnès Dopff
Le pari était osé : après le cabaret doucement punk de Raphaëlle Boitel, après le lendemain de teuf dans After all de Séverine Chevrier, Marie Molliens opère un virage à 180 degrés pour sa mise en scène de sortie d’école du CNAC. Dans BALESTRA, la promo du prestigieux établissement ouvre le bal en costumes traditionnels de Pierrot, teints blafards, fraise et pantalon à pince inclus. En parfaite cohérence avec le dress code inaugural, BALESTRA prend place dans un décor lunaire, endormi dans une pleine lumière crayeuse. Raccord avec le titre – qui désigne, dans le jargon de l’escrime, une rupture de rythme visant à surprendre l’adversaire - l’espace circulaire du chapiteau est scindé de part et d’autre par des filets sportifs surélevés, placés en écran entre scène et gradins. Dans ce terrain de jeu tiré d’un autre temps, une clique de clowns mutiques contemple le vide d’un regard médusé. Seul pendulier perturbateur, les cliquetis d’une balançoire métallique marquent le temps, charriant un.e égarée en corset, sorte de Frida Kahlo lessivée de ses couleurs.
Malgré la proximité induite par la piste sous chapiteau, cette drôle de bande postée à seulement quelques mètres des gradins semble évoluer dans un espace-temps infranchissable. Constant est le rythme de leurs déplacements, monotone l’expression hagarde qui barre leurs visages fardés d’immenses sourcils. Uniques habitants d’une bulle dont nous serions les voisins ignorés, la petite communauté monochrome quadrille son habitat, rétablissant ainsi le quatrième mur. Après un préambule de déplacements choraux, une acrobate ouvre une fuite vers les hauteurs de son mât chinois, tandis qu’une autre s’éclipse en flèche pour retrouver sa corde, suspendue à une dizaine de mètres du sol au-dessus d’un filet. Costumes et maquillages originels tombent progressivement sous l’effort, au gré des percées individuelles ou d’intermèdes collectifs dignes d’un ballet de cour.
du au
durée : 1h20
Pour obtenir le tarif adhérent valable un an, il suffit de réserver 3 spectacles.
Je ferai sûrement Les colporteurs ensuite mais je ne connais pas encore la date exacte.