Croisant savoir-faire, humour, science et histoire, Céline Cléron réunit pour sa deuxième exposition personnelle à la Galerie Papillon, des œuvres dont le poids physique est conséquent alors même qu’elles reposent sur la fragilité, la fêlure, dans une tension entre gracilité et robustesse, grâce et gravité, évanescence et durée.
Climax est un mot hybride, dans lequel on peut entendre "climat" et "maximum", qui constitue le point culminant d’un récit, juste avant que quelque chose ne survienne et que l’intensité ne retombe. On le pressent et, comme dans La Tempête de Giorgione (1), cette retenue saisit. Car dans le travail de Céline Cléron, le temps est suspendu : cette pyramide de 385 coupes à champagne en équilibre, comme on en voit dans les événements fastueux, évoque les années folles de l’entre-deux guerres, le désir de vie, de joie et d’insouciance. Certes, l’édifice tient encore, mais pour combien de temps ? L’artiste convoque en effet la notion de fracture, en écho à ce que l’on vit depuis deux ans, puisque chaque verre est fêlé ou ébréché.
Dans les archives de fouilles menées à Vénissieux ayant mis au jour des restes de céramique et de verre datant de 1927 à 1930, l’artiste découvre l’ouraline, une pâte de verre chargée en uranium dont la couleur vert-jaune devient fluorescente sous une lampe à rayon ultraviolet et qui apparaît à l’époque, malgré les mises en garde de Marie Curie, comme source de bienfaits. Séduite par l’ambivalence entre beauté et toxicité de la matière, Céline Cléron l’emploie dans la sculpture Ra, invoquant à la fois le dieu solaire égyptien et le symbole du Radium. Cette demi-sphère en verre dépoli noir, entourée d’un halo d’ouraline pâle, est réalisée en collaboration avec un maître verrier. Pour l’artiste soulignant que le soleil lui-même est radioactif, la pièce est une éclipse, un phénomène fascinant auquel on ne peut s’exposer sans équipement, comme à la radioactivité.