La figuration comme choix politique
L’ostensible fausse naïveté et la fantaisie trompeuse de cette peinture figurative inspirée de la peinture européenne — celle de l’art du portrait de la Renaissance, celle du paysage romantique du XIXème siècle ou celle des Surréalistes — met en lumière une affirmation tant politique qu’esthétique des choix de l’artiste. Formé à Yale University School of Art dans les années 1980, il explique l’adoption de la figuration comme une prise de position alternative, un chemin dangereux, mais dès lors fatalement irrésistible : « Faire de la peinture figurative quand j’étais en école d’art, c’était le mauvais choix à faire à l’époque, quand on nous enseignait l’art minimal et conceptuel. On pensait que c’était absurde, risible, et donc évidemment, comment pouvais-je bien y résister ? ».
Le monde animal en miroir de soi
Artiste conceptuel, Sean Landers utilise son expérience personnelle comme sujet. Entre biographie et fiction, il met en scène sa vie d’artiste dans un mode d’exposition de soi qui résonne aujourd’hui avec la monstration de nos vies sur les réseaux sociaux : artifice, truchement, faux-semblant… Avec humour et peut-être ironie, il met ainsi à mal l’ego de l’artiste dans The Urgent Necessity of Narcissism for the Artistic Mind, où un jaguar au pelage tartan rose et vert devenu Narcisse, s’abreuve littéralement de son reflet dans une mare. Pour arrière-plan, tel un diorama de musée d’histoire naturelle, une forêt de troncs d’arbres se développe en écho narcissique, gravés du prénom de l’artiste répété à l’infini : Sean, Sean, Sean…
Depuis plus de dix ans, Sean Landers développe sa série d’animaux à la fourrure écossaise. Cette utilisation incongrue du tartan, en trompe-l’œil, se pose en double référence à Magritte : à sa période dite « vache » de 1948 où dans un style volontairement grossier, il sape la notion de « bonne peinture » ; et aux pantoufles écossaises que le surréaliste belge portait pour peindre.
Un parcours en dialogue avec les collections du musée
La salle d’exposition temporaire du Musée de la Chasse et de la Nature sera entièrement consacrée à cette série. Ensuite, dans les salles du musée, en dialogue avec les collections permanentes, avec les portraits animaliers de Chardin (1699-1779), Oudry (1720-1178), Desportes (1661-1741) ou les animaux naturalisés, le visiteur partira à la rencontre d’une parade d’animaux tout autant merveilleux que mystérieux : lion et singe au pelage faux bois, lapin ou coq fixant avec intensité leurs observateurs pour interroger peut-être leur propre humanité.
L’exposition s’ouvrira à d’autres séries qui ponctuent le parcours artistique de Sean Landers montrant notamment l’extrême importance du texte et de l’écrit dans son rapport au Surréalisme : forêt de bouleaux aux troncs couverts d’écriture dans le bois ou bibliothèque exposant ses titres fantaisistes comme autant de devinettes ou de confessions de l’artiste.