Cette présentation au Thaddaeus Ropac Paris Marais met en lumière une sélection ciblée d’œuvres d’Alexander Calder (1898–1976). Les neuf gouaches sur papier exposées accompagnent l’une des sculptures mobiles debout de l’artiste, Crag with White Flower and White Discs (1974). Toutes réalisées dans les années 1970, les œuvres donnent un aperçu de la pratique de l’artiste américain au cours des dernières années de sa vie et offrent une autre perspective sur la décennie au cœur de la grande exposition collective Expanded Horizons: American Art in the 70s, actuellement visible au Thaddaeus Ropac Paris Pantin jusqu’au 1er février 2025.
L’œuvre sculpturale Crag with White Flower and White Discs fait partie de l’importante série Crags and Critters de Calder. L’œuvre a été présentée pour la première fois l’année de sa création dans le cadre de l’exposition Crags and Critters de 1974, aux Perls Galleries de New York, puis à la Galerie Maeght de Paris en 1975. Contrairement aux créatures ressemblant à des Critters, les Crags, dont l’œuvre présentée est un exemple, émergent du sol sous forme de formes montagneuses hyperboliques. Calder a commencé à fabriquer des stabiles dans les années 1930 : ainsi nommés par Jean Arp en raison de leurs bases immobiles posées sur le sol, en opposition à ses mobiles suspendus. L’œuvre de 1974 présentée, cependant, contient à la fois des éléments stabiles et mobiles, avec sa fleur blanche et ses disques blancs suspendus en équilibre parfait sur des tiges pivotantes qui leur permettent de tourner au moindre courant d’air. En ce sens, la sculpture présentée représente la synthèse des deux taxonomies les plus connues de Calder.
En 1937, Calder crée son premier grand stabile boulonné entièrement en tôle. Tout au long de sa vie, il explorera sans relâche les possibilités de ce matériau, façonnant la tôle pour former des œuvres fixées au sol. La base de la sculpture exposée est particulièrement élaborée, avec sa silhouette voluptueuse et sa surface perforée qui s’associent aux éléments mobiles, ludiques mais contemplatifs dans leur capacité à se déplacer doucement, pour suggérer un paysage imaginaire et sa flore. Son contour organique et courbé est typique du travail de l’artiste à cette époque et rappelle l’influence du mouvement surréaliste naissant pendant son séjour à Paris dans les années 1920 et 1930. Créée dans le sillage du premier alunissage en 1969, elle suggère également une impression abstraite de la surface rocheuse et cratérisée de la lune, faisant remonter l’intérêt des surréalistes pour le cosmologique et l’astrologique à l’aube des années 1970 dans une œuvre qui semble profondément engagée dans l’époque de sa création.
Il se peut que lorsque les astronautes et les cosmonautes, avec leurs instruments rudimentaires, iront suffisamment loin dans l’espace pour découvrir le non-espace, s’envoleront vers un autre système solaire pour se retrouver au retour, ils découvriront que Calder, avec sa vision cosmique particulière, ou universelle, ou einsteinienne, appelez-la comme vous voulez, travaillant tranquillement et seul à Saché et à Roxbury, les aura déjà anticipés et énoncé leurs expériences.