Comment les valeurs fondamentales de la Cité internationale des arts – hospitalité, convivialité, dialogue intergénérationnel et création d’espaces sûrs – se transformeront-elles au cours des 60 prochaines années ? L’exposition D’ici 60 ans : relayer et son programme d’événements associés posent cette question à des artistes de toutes générations, venant des divers continents, qui ont été en résidence à la Cité internationale des arts entre 1965 et aujourd’hui. Leurs réponses reflètent les enjeux contemporains à travers diverses approches. Certaines s’inspirent d’infrastructures écoféministes, d’autres explorent de nouveaux contrats sociaux intégrant humains et non-humains. Certaines interrogent les processus de justice restaurative et les pratiques non extractivistes et non violentes. D’autres, encore, adoptent une perspective critique sur les liens entre changement climatique, intelligence artificielle et conflits.
Se fondant sur l’imaginaire du jaillissement et de la jouissance que lui inspirent les fontaines sur les places romaines, Yosra Motjahedi conçoit une œuvre matricielle. Son point de départ s’ancre dans les ouvrages d’anatomie et de dissections, où la pulsion scopique – de voir et de posséder l’autre par le regard – se confond avec celle libidinale. De sa rencontre avec la souffleuse de verre Nadia Festuccia, elle élabore une sculpture en circuit fermé où semblent transiter des fluides corporels et du lait maternel, si ce n’est celui de la louve légendaire à l’origine fratricide de Rome. Organes sans corps, fossiles mutants, écorchés ou peaux de silicone, flux et reflux activent alors une sculpture vivante, voire une mécanique du désir. L’aspect organique résulte d’une robotique, où le mou et le dur, l’animé et l’inanimé, le profane et le sacré s’interpénètrent dans une danse sensuelle de chairs, de matières, de câbles et de liquides. – Extrait du texte écrit par Marion Zilio en 2023